Le 2 septembre 44 av. J.-C., dans un contexte politique tumultueux de Rome antique, Cicéron prononce le premier de ses célèbres Philippiques, une série de quatorze discours acerbes contre Marc Antoine. Ce jour marque le début d'une campagne oratoire déterminante, qui aura des répercussions profondes sur la politique romaine et la vie de Cicéron lui-même.
Contexte historique et politique
La Rome de l’année 44 av. J.-C. est en pleine effervescence après l’assassinat de Jules César le 15 mars. Les conjurés, dont Brutus et Cassius, ont tué César sans avoir un projet clair pour la République, laissant Marc Antoine, seul consul restant, aux commandes. Antoine, initialement perçu comme un possible interlocuteur, se révèle rapidement un gouvernant arbitraire, multipliant les abus de pouvoir et faisant preuve d’une ambition inquiétante. Cicéron, qui avait soutenu la tentative de stabilisation post-César, se désillusionne rapidement et commence à s’opposer vigoureusement à Antoine.
Les Philippiques : Structure et contenu
Les Philippiques de Cicéron sont conçues pour critiquer et attaquer Marc Antoine de manière systématique et parfois violente. Inspiré par les Philippiques de Démosthène contre Philippe II de Macédoine, Cicéron utilise un ton mordant pour dénoncer Antoine. Ses discours se divisent en plusieurs catégories :
Première Philippique (2 septembre 44 av. J.-C.) : Cicéron utilise un ton modéré pour critiquer Antoine, mais son discours marque la rupture avec le consul. Il dénonce les abus et exhorte les consuls à œuvrer pour le bien public.
Deuxième Philippique (24 octobre 44 av. J.-C.) : Écrit après les attaques d’Antoine contre lui, ce discours est un pamphlet virulent qui accuse Antoine de divers vices personnels et politiques. Il s'agit du discours le plus long et le plus cinglant de la série.
Troisième et Quatrième Philippiques (20 décembre 44 av. J.-C.) : Ces discours sont prononcés alors que Cicéron soutient Octave, le neveu de César, contre Antoine. Cicéron exhorte le Sénat à soutenir Octave et à déclarer Antoine ennemi public.
Cinquième à Septième Philippiques (1er janvier - mi-janvier 43 av. J.-C.) : Dans ces discours, Cicéron s’oppose à la proposition d'envoyer une délégation pour négocier avec Antoine et demande des actions plus décisives contre lui.
Huitième et Neuvième Philippiques (3-4 février 43 av. J.-C.) : Cicéron critique les propositions intermédiaires du Sénat et continue à réclamer une guerre contre Antoine.
Dixième à Quatorzième Philippiques (mi-février - 21 avril 43 av. J.-C.) : Ces discours couvrent les événements militaires récents, les succès de Brutus et Cassius, ainsi que les difficultés rencontrées par les forces républicaines. Cicéron persiste dans ses critiques contre Antoine et ses partisans.
Répercussions et conclusion
Malgré la passion et l'éloquence de Cicéron, ses Philippiques ne parviennent pas à changer le cours des événements comme il l’espérait. En 43 av. J.-C., le pouvoir des triumvirs, dont Antoine est un membre clé, devient dominant. Cicéron, ayant réussi à faire déclarer Antoine ennemi public, se retrouve cependant en difficulté face au second triumvirat. Il est finalement proscrit et exécuté sommairement le 7 décembre 43 av. J.-C.
Les Philippiques témoignent non seulement de l’agitation politique de l’époque, mais aussi de l'habileté rhétorique de Cicéron. En attaquant Antoine avec une virulence inégalée, Cicéron espérait restaurer les principes républicains, mais se heurte à une résistance trop grande pour être surmontée. Son courage et ses efforts oratoires demeurent un témoignage puissant des tumultes de la Rome républicaine et de la lutte pour le pouvoir dans les derniers jours de la République romaine.
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