L’assassinat de Jean sans Peur : trahison sur le pont de Montereau

 Assassinat de Jean sans Peur au Pont de Montereau | BnF Essentiels

Nous sommes en 1419, en pleine guerre de Cent Ans, une époque où les grandes familles de France se déchirent autant que les royaumes. Le royaume est en crise, et la rivalité entre les Armagnacs et les Bourguignons atteint son paroxysme. Deux factions s’opposent, chacune cherchant à prendre le contrôle de la couronne, alors que le roi Charles VI, surnommé "le Fou", sombre peu à peu dans la démence. C'est dans cette tourmente que se déroule l'un des assassinats les plus célèbres et tragiques de l'histoire de France : celui de Jean sans Peur, duc de Bourgogne.

Jean sans Peur, fils de Philippe le Hardi, est l’homme fort du duché de Bourgogne, un prince puissant et redouté. Il est surnommé ainsi non pour son absence de peur face au danger, mais pour son audace à défier le roi lui-même. Depuis des années, il entretient une guerre politique et personnelle contre les Armagnacs, une autre faction noble qui, sous l’égide du roi de France, cherche à affaiblir le pouvoir bourguignon.

Le 10 septembre 1419, sur le pont de Montereau, tout bascule. Après des années de lutte, Jean sans Peur et le dauphin Charles (futur Charles VII) décident de négocier la paix. Ce pont est le théâtre choisi pour des discussions qui, espèrent-ils, pourraient ramener un semblant de stabilité dans ce royaume meurtri par les conflits internes et l'invasion anglaise. Mais derrière les promesses de réconciliation, les cœurs sont emplis de méfiance et de haine.

Le pont, étroit et surplombant les eaux calmes de la Seine, devient le centre de toutes les attentions. Les hommes de Jean sans Peur et ceux du dauphin sont nerveux, leurs mains prêtes à dégainer. Le duc, vêtu de ses riches habits bourguignons, avance avec fierté vers Charles. Tout semble se dérouler selon le protocole : les deux hommes échangent quelques mots, la tension est palpable mais contenue.

Et puis, soudain, le temps se fige. Dans un éclair de violence, les hommes du dauphin se jettent sur Jean sans Peur. Des lames scintillent sous la lumière du soleil, des cris résonnent, et le duc tombe. Les coups pleuvent, impitoyables. Jean sans Peur, guerrier redouté et prince influent, gît à terre, mortellement frappé. Son sang, ce symbole de la puissance bourguignonne, se mêle aux eaux du fleuve sous le pont de Montereau. Ce n’est pas une simple exécution : c’est une trahison, un meurtre prémédité, qui scelle le destin du royaume et celui de la guerre civile qui le ronge.

Ce crime abject ne fait qu'enflammer davantage la haine entre les Armagnacs et les Bourguignons. La Bourgogne, en deuil, se tourne vers un nouvel allié : l'Angleterre. Cette alliance changera la face de la guerre de Cent Ans, plongeant la France dans des années de conflits encore plus sanglants. L'assassinat de Jean sans Peur devient ainsi un tournant tragique, ouvrant une nouvelle page sombre dans l’histoire de France.

Le pont de Montereau, désormais symbole de trahison, reste gravé dans la mémoire collective. Le spectre de Jean sans Peur hante encore ces lieux, rappelant à ceux qui traversent ces eaux que l'ambition et la soif de pouvoir ne connaissent ni paix, ni répit.

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