1868 : La Gloriosa – Le Souffle Révolutionnaire qui Chassa Isabelle II du Trône d'Espagne

 Révolution de 1868 — Wikipédia

Le Cœur en Flammes d’une Nation : La Gloriosa Révolution de 1868

Il était une fois, dans la chaleur languide de septembre 1868, une Espagne en ébullition. La monarchie, usée par les intrigues de cour et les échecs politiques, tremblait sous le poids du mécontentement populaire. C’est dans ce climat de frustration et de révolte que naquit une révolution aussi fulgurante que son nom, La Gloriosa – la Révolution Glorieuse.

L’Espagne, sous le règne d'Isabelle II, était une terre de contrastes. La reine, héritière des Bourbons, avait accédé au trône à l’âge tendre de trois ans en 1833. Mais son règne, entrecoupé de guerres civiles, de trahisons politiques et de scandales personnels, finit par faire sombrer le royaume dans la discorde. L’ombre de la corruption et du népotisme s’étendait sur la cour, tandis que la pauvreté et l’instabilité économique accablaient le peuple. Sous ce règne vacillant, les tensions atteignirent un point de non-retour.

Le Départ du Vent de Révolte

Tout commença au cœur de Cadix, ce port baigné par les vagues atlantiques, le 18 septembre 1868. Ce jour-là, un groupe de militaires, mené par les généraux Juan Prim et Francisco Serrano, leva l’étendard de la révolte. Les cris d’insurrection retentirent : "À bas les Bourbons ! Vive la Liberté !" La Gloriosa s'était déclenchée comme une tempête en pleine mer, soudaine, dévastatrice et impossible à arrêter.

Dans tout le pays, les citoyens, fatigués de décennies d'autoritarisme et d'incapacité royale, embrassèrent le mouvement. Des émeutes éclatèrent dans les grandes villes, de Barcelone à Madrid, et des foules prirent d'assaut les bâtiments gouvernementaux. À Cadix, où le flambeau révolutionnaire s'était allumé, les troupes fidèles à la monarchie furent balayées par la marée populaire.

L'Effondrement d’une Dynastie

Le général Serrano, une figure clé de la noblesse militaire, prit la tête des armées rebelles. L’ancienne gloire des troupes espagnoles, ravivée par la flamme révolutionnaire, se retourna contre leur propre souveraine. Serrano, bientôt soutenu par Prim et d’autres généraux influents, fit route vers Madrid, prêt à détrôner une reine autrefois invincible.

Isabelle II, isolée au milieu de ce chaos, tenta désespérément de sauver son trône. Elle fit appel à ses ministres, mais ils se dérobèrent un à un. Ses partisans parmi les élites étaient eux-mêmes épuisés par les échecs successifs du régime. L’armée royale, traditionnellement loyale, se désagrégeait peu à peu, emportée par l'esprit de liberté qui soufflait dans toute l'Espagne.

Le 29 septembre 1868, après des semaines de soulèvement, les forces de la révolution remportèrent une victoire décisive à la bataille d’Alcolea. Ce jour-là, l’armée loyaliste fut vaincue par les troupes insurgées, scellant ainsi le sort de la reine. L’Espagne était désormais une terre où le vent du changement soufflait fort et où l'écho des slogans révolutionnaires résonnait dans chaque vallée, chaque ville, chaque port.

L'Exil de la Reine et le Triomphe du Peuple

Face à l'inexorable avancée des forces révolutionnaires, Isabelle II comprit que son règne était terminé. Le 30 septembre 1868, elle quitta précipitamment Madrid et chercha refuge en France. Ce départ signa la fin de la dynastie bourbonienne sur le trône d’Espagne, du moins pour un temps. La reine déchue se retira à Paris, où elle passa ses dernières années dans l’ombre, loin des fastes de la couronne.

L’Espagne, désormais libérée de son monarque, entra dans une ère d'incertitude mais aussi de promesse. La junte révolutionnaire, dirigée par Prim et Serrano, prit le contrôle temporaire du pays. Ils s’efforcèrent de donner un nouveau souffle à la nation, rêvant d'une Espagne où la liberté et la justice régneraient.

Les Racines du Changement : Vers une Monarchie Constitutionnelle

La chute d'Isabelle II n'était pas seulement le fruit de la colère populaire ; elle était aussi la conséquence de décennies de lutte entre conservateurs et libéraux, entre absolutisme et modernité. À une époque où l'Europe voyait naître des mouvements démocratiques partout, de la France à l'Italie, l’Espagne ne pouvait rester à l’écart de ce souffle de liberté. La Gloriosa était l’expression d’une Espagne qui aspirait à sortir de l’ombre du despotisme et à entrer dans la lumière de la démocratie.

Après l’exil d’Isabelle II, la junte révolutionnaire engagea un vaste débat sur l’avenir du pays. Les conservateurs appelaient au retour de la monarchie sous une forme plus modérée, tandis que les républicains réclamaient l’établissement d’un gouvernement sans roi. La tâche était immense : il fallait reconstruire un pays dévasté par les divisions internes et guérir les plaies laissées par des décennies d’un règne contesté.

Finalement, en 1870, après plusieurs années de tergiversations et de débats, un nouveau roi fut choisi : Amédée de Savoie, un prince italien qui accepta de régner sous une monarchie constitutionnelle. Ce choix marqua le début d’une nouvelle ère pour l'Espagne, bien que brève, car la Première République espagnole naîtrait peu après en 1873.

La Gloriosa : Un Moment Décisif dans l’Histoire de l’Espagne

La révolution de 1868, baptisée La Gloriosa, fut plus qu’un simple soulèvement ; elle fut le symbole d’un peuple en quête de liberté, d’égalité et de modernité. Elle marqua la fin d’un règne absolutiste et l’ouverture d'une période d'expérimentations politiques et de réformes. En exil, Isabelle II resta une figure du passé, une reine dont le destin était scellé par le vent de l'histoire.

Avec La Gloriosa, l’Espagne entra de plain-pied dans le XIXe siècle européen, celui des révolutions, des idées nouvelles et des bouleversements. Ce moment fondateur, bien qu’agité et tumultueux, resta gravé dans la mémoire collective comme une victoire de la liberté contre l’oppression, un éclat de lumière dans les ténèbres du despotisme.

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