1668 : Molière, l'ombre de l'avarice éclaire le théâtre du Palais-Royal

 

En cette soirée parisienne de septembre 1668, les rues pavées bruissent de rumeurs. Au cœur de la capitale royale, un événement fait parler tout le monde : la première d’une nouvelle pièce de Molière, le dramaturge que tout Paris adore. Ce nom fait vibrer autant les salons mondains que les marchés populaires. Sous les lustres étincelants du théâtre du Palais-Royal, une foule impatiente s’entasse, les murmures et les rires résonnent, et tous ont les yeux fixés sur la scène.

La lumière des chandelles vacille et soudain, le rideau se lève. Un silence respectueux s’installe. C’est alors que surgit un homme, sec, rigide, au regard perçant : Harpagon. L’avarice incarnée. Ses doigts crochus se resserrent autour d’une cassette imaginaire, symbole de sa richesse mal acquise, et chaque mot qu’il prononce semble alourdi par l’or qu’il cache. Harpagon n’aime personne, ni ses enfants, ni ses serviteurs. Seule la crainte de perdre sa fortune fait battre son cœur.

Molière, tel un maître alchimiste des mots, mélange habilement comédie et critique sociale. Derrière chaque ricanement du public, on sent une gêne, car sous les traits grotesques du personnage se cache une réalité bien trop familière : celle des puissants obsédés par l’argent, des hommes et des femmes sacrifiant les relations humaines sur l’autel de la cupidité.

Au fil des actes, l’avidité de Harpagon devient une prison qu’il se forge lui-même. Les spectateurs rient aux éclats, mais dans l’obscurité, certains esquissent des sourires jaunes, conscients que cette pièce ne parle pas que d’un vieil avare de fiction, mais de l’avarice présente dans chaque recoin de la société.

L'Avare n’est pas simplement une comédie. C’est un miroir tendu à la noblesse, à la bourgeoisie, et à tous ceux qui, dans la quête insatiable de richesse, ont oublié l’essence même de l’humanité. Et ce soir-là, Molière, avec cette plume acérée, grave un nouveau chef-d’œuvre dans l’histoire du théâtre français. Une œuvre qui traversera les siècles, écho de la folie des hommes, rappel de l’importance des liens du cœur sur ceux du portefeuille.

Commentaires